La rando du week-end : En traversant la Plaine des Lianes          
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ARTICLE DU 07/01/02
Volcan  
Lorsque le moment sera venu de baptiser le cône né de l’éruption qui a débuté samedi soir à 23 h, on pourrait conseiller à l’observatoire de retenir le nom de Désirée. Depuis août de l’année dernière, le piton de la Fournaise jouait avec les nerfs des scientifiques.
De préalerte en alerte, le volcan a ménagé le suspense. Et ce n’est peut-être pas fini. Le phénomène présente bien des similitudes avec celui qui, en 1977.


 
Lire aussi :
• Piton de la Fournaise en images : Eruption du 05 janvier 2002
• Sérénité au pied du volcan
• Le volcan en éruption


LES COULÉES VISIBLES DE LA RN 2 AUJOURD'HUI ?
Les situations évoluent vite parfois : alors que la préfecture insistait en fin d’après-midi d’hier sur l’impossibilité de voir quoi que ce soit de l’éruption depuis le pas de Bellecombe ou la RN 2, la gendarmerie indiquait hier soir la présence de lueurs distinctes en surplomb des dernières pentes du Grand-Brûlé. En clair, une sortie des coulées de la plaine des Osmondes où elles stagnaient depuis samedi soir était possible au cours de la nuit dernière. Mais seront-elles visibles en plein jour ce matin ? On peut en douter étant donné la faiblesse du débit.
A part cela, comme on le sait, l’accès à l’enclos du piton de la Fournaise est interdit. Le sentier qui mène au piton de Partage puis au Nez coupé du Tremblet est également interdit… Du Pas de Bellecombe, seules des lueurs sont visibles la nuit puisque le site de l’éruption est dissimulé à la vue par le piton de Partage. De jour, seul un panache de l’éruption (gaz et vapeur) est visible.

Elle se faisait attendre depuis août 2001

Piton de la Fournaise : Une éruption nommée Désirée


Les volcanologues nous fourniront-ils un jour l’explication sur un point de détail, mais qui pour tous les passionnés de volcans demeure un mystère, pourquoi le piton de la Fournaise se réveille-t-il si souvent la nuit ? Nombre de nos souvenirs de départ sur des éruptions sont rythmés par la sonnerie aigrelette du téléphone à des heures peu chrétiennes.
Fidèle à ses habitudes et comme soucieux de soigner le spectacle — les éruptions sont toujours plus belles à observer la nuit — c’est donc à 23 h samedi soir que le volcan a ouvert le feu à quelques centaines de mètres du pied du Nez Coupé de Sainte-Rose à la limite de la rupture de pente dominant la plaine des Osmondes.
Départ rituel peu avant 3 h du matin, cap sur le pas de Bellecombe. En passant Saint-Suzanne, le regard se porte presque instinctivement en direction des contreforts du volcan qui se découpent en ombre chinoise. Au-dessus flotte un nuage jaune orangé signature dans le ciel de l’éruption.
En dépit de l’heure matinale, quelques voitures escaladent la route partie de Bourg-Murat. Au terminus, le parking est déjà bien encombré. Le bouche à oreille a semble-t-il bien fonctionné. L’annonce du début de l’activité est tombé bien trop tard pour être relayée par télés et radios. La lueur dans le ciel a vraisemblablement drainé les premiers curieux.
Faute de pouvoir descendre dans l’enclos interdit, le point de ralliement est le piton de Partage et surtout le Nez coupé de Sainte-Rose, d’où les épanchements de lave sont visibles.
Pour l’heure, depuis le Pas de Bellecombe et même dans la descente vers le fond de l’enclos, barrée sans ambiguïté par un solide panneau d’interdiction, rien à l’horizon. L’éruption aurait-elle joué les filles de l’air ?
Dans le ciel qui commence à prendre les couleurs de l’aube, un panache de fumée trahit cependant sa présence.
Sous nos pieds, les dalles de lave qui ont vu passer les milliers de randonneurs en route pour l’éruption du siècle du Kapor, en 1998. Cette partie du parcours nous est familière mais après c’est l’incertitude. Quel terrain allons-nous trouver ?

UN BALLET DE RIDEAUX DE FEU
De fait, la progression jusqu’au pied du Piton de Partage est rapide sur le balisage de secours. Dans la foulée nous avalons une portion de gratons difficile à digérer.
Une bonne surprise nous attend à la sortie. Des laves cordées nous tracent une voie royale. Le jeu consiste à ne pas perdre ce précieux fil d’Ariane qui nous rapproche de l’éruption.
Avant même que les premières projections ne se lèvent au dessus de l’horizon, le bruit sourd des grondements de la Terre remuée au plus profond de ses entrailles accompagne chacun de nos pas. Et puis soudain le ballet des rideaux de feu qui se dressent et s’escamotent en cadence est devant nous sur fond de mer de nuages d’où émerge le soleil.
L’éruption a pris ses quartiers à la limite de la rupture de pente qui dévale vers la plaine des Osmondes en contrebas. Difficile de s’approcher. La chaleur est intense et de temps en temps le vent apporte une bouffée de gaz qui serre les poumons.

BOUCHES EN SOMMEIL
Le phénomène n’est pas d’une très grande puissance. Seules deux des quatre fissures de la veille au soir sont encore actives à l’aube de ce dimanche matin et lancent vers le ciel leurs fontaines de laves. En amont, des fumées trahissent les bouches éruptives désormais en sommeil. Les coulées dévalent la pente abrupte et vont se perdre à nos pieds dans la plaine des Osmondes, entre les cratères Haug et Alfred Picard.
Du sommet du Nez coupé de Sainte-Rose, les spectateurs nombreux ne manquent pas une miette de la représentation offerte après des mois d’attente par le piton de la Fournaise.
Mais de là où nous sommes, nous bénéficions d’une prestation de grande classe. Projection après projection, l’éruption batit un mur qui enserre un lac de lave littéralement accroché à la pente, le tout enserré dans un écrin constitué sur la gauche par le rempart prolongeant le Nez coupé de Sainte-Rose et sur la droite par le piton de Crac. Dans le lointain, le Grand Brûlé vient mourir sur la plaque d’argent de l’océan. Le spectacle se renouvelle de minute en minute bâtissant à chaque fois un nouveau tableau dans une symphonie rouge orangée.
On ne se lasse pas, mais le chemin du retour est pavé tout de même de quelques difficultés. En route donc. Le spectacle se joue désormais à huis clos en espérant que le piton de la Fournaise sera rendu le plus rapidement possible à ses admirateurs.


UNE SORTIE DE LAVE HORS ENCLOS TOUJOURS POSSIBLE
L’éruption qui a débuté samedi, à 23 h, au pied du Nez coupé de Sainte-Rose ne permet pas pour autant d’écarter l’éventualité d’une phase suivant, hors enclos. Le sous-préfet Guy Mascrès, le soir-même, en parlait donc comme d’un “répit”.
L’hypothèse envisagée par les scientifiques d’une sortie de lave dans les hauts de la commune de Sainte-Rose (notre édition d’hier) s’appuie, entre autres, sur la connaissance des éruptions passées du piton de la Fournaise, celle de 1977 en l’occurrence, même si l’observatoire de l’Institut de physique du globe n’existait pas à cette époque.
De ce fait, il est impossible de comparer les crises sismiques qui les ont précédées, mais celle de samedi, d’une durée inhabituelle de plus de six heures, indique bien que le magma a migré loin de la zone centrale du volcan, avec un point de sortie correspondant d’ailleurs exactement à celui de l’éruption de la première phase de l’éruption de 1977 (lire en page 6), relève la sismologue Valérie Ferrazzini.
Au lendemain de l’éruption, le trémor a déjà bien baissé, commentait hier soir Thomas Staudacher, directeur de l’observatoire. Mais le réseau de surveillance continue d’enregistrer une certaine sismicité, qu’il faut relativiser toutefois, ajoutait-il : certains événements peuvent être attribués à des sautes de niveau du trémor qui accompagne la sortie du magma. Quelques séismes de magnitude de l’ordre de 1,5 ont tout de même été enregistrés hier.
Cette activité liée à l’hypothèse d’une autre phase éruptive hors enclos est à l’origine des interdictions tous azimuts lancées hier par la préfecture (lire par ailleurs). Il ne fait pas de doute que la zone du Nez coupé de Sainte-Rose, mise à rude contribution depuis toujours par la fracturation qui affecte le rift (axe de faiblesse) nord du volcan, mérite d’être placée sous haute surveillance. La migration du magma hors enclos lors de l’éruption de 1998 avait ainsi provoqué éboulements et fissures de plusieurs dizaines de centimètres de large dans la partie du sentier située sous le Nez coupé, en allant vers Bois-Blanc. Depuis, l’ONF a dû tracer une portion de chemin entièrement nouvelle et plus éloignée du rempart.
De là à interdire purement et simplement l’accès au piton de Partage, situé à 2,5 kilomètres de la zone incriminée … l’annonce de cette décision a été accueillie hier avec consternation par des intervenants en sciences de la Terre : en l’absence de danger sur ce site, ils cherchent quels autres motifs liés à la sécurité publique auraient pu dicter cette mesure.


LE SEUL SENTIER QUI PERMETTAIT DE VOIR LE SPECTACLE A ÉTÉ FERMÉ HIER À 13H
Éruption confisquées
Enfin une éruption qui ne se cache pas au fin fond de l’enclos ! Contrairement à Parvêdi, Morgabim et consorts, celle-ci se laisse apercevoir à moindre frais, certes plus lointaine tout de même que celle du piton Kapor, approchée par des dizaines de milliers de personnes en 1998. Hier matin, des randonneurs ont filé sur le sentier qui longe le rempart jusqu’au promontoire du Nez coupé de Sainte Rose. Heureux. Mais 13 h, la préfecture a interdit le sentier : l’éruption se déroule désormais à huis clos. Pas de bol.
Il y a eu les chanceux, les lève-tôt qui ont pu prendre la route. Véronique et Karine, ravies d’ajouter cet extra volcanique au programme de leur vacances, sont allées jusqu’au piton de Partage. Trois kilomètres et une heure aller retour. “Nous ne sommes pas des grandes randonneuses, mais aller jusque là c’était à notre portée. Oui, on voit de là haut. C’est petit, mais ça suffit.”
Avec un petit peu plus de courage, on pouvait aller jusqu’au Nez coupé de Sainte-Rose. Une mère de famille avec deux enfants de moins de dix ans a bouclé le parcours de neuf kilomètres en un peu plus de 3 h 30. Stéphane et Willy, 23 et 15 ans, l’ont fait aussi : “Je suis d’ici mais c’était la première fois que je voyais une éruption. Là haut, on était juste en face, à 500 mètres à vol d’oiseau.” En prime il y avait les coulées de lave qui avancent vers la plaine des Osmondes. Point de vue imprenable.
Des dizaines de personnes se sont lancées sur ce sentier dès les premières heures de la matinée. Il y a eu jusqu’à une trentaine de randonneurs réunis au sommet du Nez coupé. On déplore finalement peu de problèmes : le peloton de gendarmerie de haute montagne est intervenu tout de même à deux reprises, vers 9 h d’abord pour secourir une jeune fille qui souffrait d’une entorse, puis à 11 h pour une septuagénaire victime d’un malaise.

MACHINE ARRIÈRE
Dans la matinée, la préfecture a toutefois décidé de fermer le sentier, et de priver Réunionnais et touristes de leur seul point de vue sur l’éruption. “Nous ne savons pas encore comment peut évoluer le phénomène, expliquait hier en fin d’après midi le sous préfet Guy Mascrès. L’observatoire volcanologique enregistre toujours des séismes et nous pouvons craindre des éboulements sur le Nez coupé de Sainte-Rose, voire une éruption hors enclos.”
À 13 h, les gendarmes en faction au Pas de Bellecombre ont barré l’accès au sentier. À 16 h, leurs collègues du PGHM ont été déposés par hélicoptère au Nez coupé de Sainte Rose et ont ramené avec eux tous les randonneurs encore en chemin.
Hier soir, le sous-préfet a réuni autour de lui tous les acteurs de la sécurité publique pour vérifier le dispositif de secours en cas d’éruption hors enclos.
La question de la réouverture éventuelle du sentier du Nez coupé n’a pas été évoquée. Des incertitudes demeureraient.
L’enclos va également rester fermer aujourd’hui. Il n’a pas encore été envisagé de tracer un sentier vers le site de la nouvelle éruption, ni de rouvrir de sentier du tour des cratères, qui ne présente semble-t-il guère de risques. Le parapluie a été ouvert en grand. On peut attendre les réactions frustrées des professionnels de la montagne et des Réunionnais. Le sous-préfet ne leur concède qu’un point : dès que les scientifiques pourront écarter tout danger, affirme-t-il, les interdictions seront levées dans les meilleurs délais.


Alain Dupuis / François Martel-Asselin / Philippe Petit









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